C.S. 3 : Noir

Un éclair et puis plus rien. Quand je dis plus rien, ce n’est plus rien : les ténèbres et le vide combinés ensemble. J’étais emplis de sensations effrayantes que rien ne justifiait, puisque je ne me souvenais pas de ce qui s’était passé auparavant. Ma mémoire semblait bloquée. Je revoyais la lumière puis le trou noir, expression qui, dans mon cas, n’était pas à prendre au sens figuré.
Mais où étais-je ? Mes sens étaient incapables de me renseigner. Le silence était assourdissant pour mes oreilles habituées aux bruits de la vie. Mes yeux, eux, étaient terrifiés par la couleur uniforme de mon environnement. J’avançais mes mains devant moi, sans résultat : elles ne rencontraient aucune résistance.
Une idée terrible s’imposa alors à moi : j’étais dans une prison, je ne pourrais jamais sortir de ce rien, de ce néant. Je savais que je n’étais pas en train de rêver, j’en étais convaincu. La panique s’insinuait petit à petit dans tout mon être. Je voulus me débattre et envoyai des signaux à tous mes muscles pour qu’ils s’activent. C’était [en le supprimant, ça sonne mieux je trouve] une attitude désespérée qui n’obtint aucun résultat.
Étrangement je ne pensai pas à « avant » dans ce moment d’intense angoisse, mon seul but était [étant] l’ « après ». Je ne songeais pas à ce que j’allais perdre si je restai enfermé dans cette obscurité éternelle, mais plutôt à ce que je pourrai gagner en sortant de ce lieu. Je voulais seulement récupérer [contradiction] mon corps, mes sensations, ce qui faisait que j’étais, ou du moins avait été,[contradiction] un être humain. [/color][/font][/size]


Je ne sais pas combien de temps durèrent ces instants affolants mais je fus forcer de stopper cette folie brusque, quand ma raison pris le pas sur mes instincts affolés. Il fallait que je me calme car tout effort était vain. Par réflexe, je voulu m’asseoir pour réfléchir, mais je n’y parviens pas, basculant dans le vide à chaque tentative. A la suite de ces échecs répétés, la terreur menaça à nouveau de m’envahir. Je gardais tout de même mon sang froid : je m’adaptai malgré tout à la situation. Réfléchir, il fallait que je réfléchisse. Je voulais sortir, mais comment ? Mon corps ne semblait pas en état de marche, seul ma tête fonctionnait. Que pouvait mon esprit sur une prison invisible ? Je fus frappé par l’évidence : La solution était peut être, justement en moi.
Je tentai de projeter mon esprit dans le vide, concentrant toute mes forces et mon attention. Il y eut soudain un mouvement. Je n’aurai pas pu le jurer. Mais j’avais, semblait-il, réussi à obtenir une réaction comme si un objet, plus noir encore que l’obscurité où je me trouvai, s’était détaché du reste. Avais-je rêvé ? Peut être. Mais c’était mon seul espoir. Et puis après tout, je ne perdais rien à réessayer.
Je continuai donc de « sortir » de moi, de me transcender. Répétant l’opération, je pris soudain conscience que je n’avais plus de corps, il n’était pas seulement imperméable à toutes sensations ou ankylosé comme je l’avais d’abord cru, mais il avait totalement disparu.
Je n’entendais plus mon coeur, c’est [temps] ce qui avait provoqué cette révélation brusque et déroutante que je n’étais plus qu’un esprit. Bizarrement, dès que j’eus intégré [plutôt admit] cette idée, je me sentis beaucoup mieux. Je commençais à comprendre... comprendre quoi, je ne [ le ] savais pas, mais une sorte d’évidence s’insinuait en moi : Je n’étais pas là par hasard. Ce que je fis ensuite fut totalement inné [ ? ou instinctif ? Un caractère (pas au sens des sentiments) inné, je connais, mais un geste … ? Je sais pas.], comme si j’avais toujours su ce qu’il faudrait faire le moment venu. J’ouvris lentement ma conscience sur le vide. Chaque pensée, réflexion et émotion s’envolaient autour de moi, à la fois lointaines et proches de ce que j’étais profondément. [J’aime bien !]
Paradoxalement, je vécu cette séparation comme une construction...C’est le mot, je crois, je me construisais, je me formais, je naissais.
Lorsque j’eus totalement fait corps avec le néant, je senti en moi, dans cette partie qui était réellement ce qui me constituai au plus profond de mon être, une chaleur énorme se répandre. Une lumière invisible m’envahit soudain et je su, à cet instant, que plus rien ne comptait...ni avant, ni l’obscurité, ni après. J’étais devenu le tout qui équilibre le rien, la lumière qui comble l’obscurité. J’étais l’infini et l’essentiel. Ces sentiments étaient indescriptibles. La mort et la vie se mêlaient en moi en une mélodie entêtante. Je savais que je vivrais pour toujours dans le noir mais que je serai une lumière pour les autres. C’était un instant d’une idéale incompréhension... heureuse. Je n’avais même pas à prier que cela dure toujours, car j’étais l’éternité. [J’adore ce paragraphe !]

Extrait du manuel n°1 : Apprendre à mourir (témoignage), chapitre cinq : Comment devenir une étoile ? Par le professeur Bransons (7530-7670).